Edité en collaboration avec : L’ISAC, De l’Arba – Esa

Sous-la direction de : Eric Van Essche

Texte(s) : Daniel Blanga-Gubbay, Laurent Courtens, Adrien Grimmeau, Anne-Esther Henao, Catherine Hankinet, Aurore Joly, Marc Partouche, Eric Van Essche
2013
37 pages
5 EUR 

Édition

Dés-orienté(s)

Dés-orienté(s)

Le corps mouvant, le corps parlant, le corps traçant

Le terreau créatif de Julien Bruneau prend assise dans le mouvement, discipline qu’il expérimente par le biais de trois pratiques croisées: le dessin, la danse et la parole. Dans cette recherche complexe, vient s’ajouter la dimension collective. Il y a dans le travail de l’artiste la volonté de faire œuvre ensemble et d’explorer à plusieurs les eaux souterraines qui alimentent les sources communes des arts plastiques et de la danse. Depuis bientôt trois ans, avec l’équipe de Phréatiques (Maya Dalinsky, Nada Gambier, Anouk Llaurens, Laure Myers, Jeroen Peeters et Sonia Si Ahmed), il crée des performances mêlant ces différentes pratiques au cœur d’un seul et même matériau qui est le corps.

Au lieu de la trace

Pour dés-orienté(s), Julien Bruneau a conçu une installation intitulée Retrait. Formée par un angle aigu entre le mur portant et une cloison de six mètres de long, Retrait traverse l’espace d’exposition en créant un nouveau lieu. Sur les parois intérieures, les danseurs auront laissé les traces de leur passage par un dessin aléatoire fondé sur le mouvement de leur corps et sur la contrainte de l’architecture étroite et resserrée de l’angle. Invité à s’aventurer dans ce lieu, le spectateur est ici confronté à la question du «point de vue». En effet, s’extrait-il de l’espace d’exposition ou entre t-il dans un autre espace ? Sur fond obscur, les traits au crayon seront à peine perceptibles et se joueront du spectateur qui ne pourra jamais en saisir la lecture globale. Par ailleurs, l’espace réduit ne permet aucun recul. Le dispositif est donc une sollicitation à expérimenter physiquement la perception du dessin: le visiteur éprouve le lieu avec son corps en cherchant une trajectoire possible, et prolonge à sa manière les différents parcours créés en amont par les danseurs. Une autre dimension du travail de Julien Bruneau est l’exploration de la pensée spatialisée et oralisée. Lors du processus de création, les danseurs sont encouragés à formuler des fragments de pensée qui surgissent dans le mouvement et dans l’acte de dessiner.

Retrait est une proposition faite aussi bien au danseur qu’au spectateur de s’engager face à l’œuvre avec son corps, sa tête et ses sens. En filigrane, elle relève également de questionnements philosophiques sur l’étude des phénomènes. Comment se compose l’expérience ? Comment sommes-nous affectés par ce que nous percevons et comment nos états affectifs influencent-ils notre perception ?